15 juillet, je m’envole vers les contrées scandinaves, bien décidée à sonder le mystère de l’exception suédoise. Ce pays aux allures d’élève modèle m’intrigue au moins autant que m’excite la perspective de me goinfrer de harengs marinés pendant cinq jours. Mon estomac et moi sommes prêts pour quelques jours d’aventure au pays du grand froid.
Tout ce que vous avez toujours cru sur les suédoises…est vrai
Première surprise à la descente de l’avion : la chaleur. A celles qui pensent encore qu’été suédois rime avec parka, retournez voir le film d’Al Gore ou taisez vous à jamais. Bon, c’est pas la canicule non plus, mais, pour le plus grand bonheur de mes yeux, shorts et mini-jupes sont de sortie. C’est là ma première confrontation avec les moeurs locales. Ici, les filles ne craignent pas de montrer les jambes (qu’elles ont fort longues), leurs bras (qu’elles ont fort bronzés), leur décolleté (qu’elles ont plongeant) etc. La suédoise est généralement assez à l’aise avec son corps.
Si un tel étalage est possible, c’est d’abord que la rue n’est pas un espace hostile. Contrairement à la France, les hommes n’ont pas le monopole de l’espace publique. C’est d’ailleurs ce qui me frappe d’emblée : je m’étonne de voir autant de femmes dehors. Non pas qu’il y ait une démesure démographique. Les suédoises ne sont pas plus nombreuses que les suédois : elles occupent en revanche davantage la ville qui m’apparait comme un espace mixte et sécurisé.
Peut-on pour autant en déduire qu’il n’y a pas de violences sexuelles ou de harcèlement dans les rues de Stockholm ? Certainement pas. Quitte à écorner le mythe de la belle société égalitaire, la Suède enregistre des chiffres records de plaintes pour viol. Un recensement qui place le pays en tête des nations européenes. Mais si ces résultats sont si médiocres c’est aussi (et à mon avis, surtout) parce que les victimes osent porter plainte, preuve que le viol ne cache pas son nom.
Et les lesbiennes dans tout ça ?
En Suède, l’homosexualité n’est plus tabou. Se balader main dans la main avec sa copine n’engage aucun regard méprisant ou curieux. On a l’agréable impression de passer inaperçue. Le revers, c’est qu’il n’y a très peu de lieux dédiés aux lesbiennes. Dans un magazine LGBT gratuit que l’on trouve partout en ville (même chez l’épicier du coin), une page recense tous les bars, clubs et soirées de la communauté. Une trentaine tout au plus, principalement gay évidemment. C’est que les gays et les lesbiennes peuvent sortir n’importe où sans craindre l’opprobre publique. Alors à quoi bon se rassembler ? L’intégration a atteint son paroxysme, de sorte qu’en se rendant au restaurant Urban Déli, lieu étiquetté « friendly », je suis surprise de croiser des familles avec enfants en plein déjeuner familial. On est bien loin de l’ambiance « Manif pour tous ».
Ceci est un lieu gay
Troisième jour, je décide d’aller à la rencontre de la locale, bien décidée -à me rincer l’oeil- à m’enrichir de nouvelles rencontres. Direction un bar de Sofo, le quartier branché de Sodermalm, une île au sud de la ville. Au Retro, un bar à l’allure de pmu chic, une dizaine d’écrans retransmettent le match de football féminin Suède-Italie. Ici, le foot féminin connait une vraie popularité. Le bar est donc bondé : d’hommes, de femmes, d’hétéros… et de lesbiennes. Tous les genres, mais plutôt blanches… et plutôt blondes. Si on aime la grande liane musclée, ambiance Walkyrie conquérante, on est servi. Si on veut un peu la diversité, on repassera. Ici, les femmes sont minces, grandes, blondes. Une uniformité qui m’interpelle et qui questionne la politique d’immigration du gouvernement. En mai dernier, des émeutes avaient explosé dans la banlieue de Stockholm, témoignant du désengagement des services publics à l’égard de ces quartiers. Les discriminations envers les populations immigrées sont manifestes. L’accès à l’emploi et au logement est un véritable problème. On se mélange peu au pays de la tolérance.
Mais retournons à nos ballons. Par chance, les suédoises jouent à domicile. En face de moi, un groupe de filles engouffre des burgers en commentant le match, exultant dès que leur équipe marque un but. Déterminée, elle en marquera trois. Pas d’effusions de joie (ni de vitres cassées). Après quelques sourires et deux-trois bières, chacun rentre chez soi. En semaine, les suédois sont des gens sages.
Bravo le filles. Et maintenant, tout le monde au lit.
Bonne chair.
J’avais prévenu en introduction, vous n’échapperez pas à un débrief culinaire (oui, je vieillis). Je crois que si j’ai autant apprécié manger, c’est que les serveuses n’ont pas leur pareille pour vous fidéliser. Entre celle qui s’assoit à ta table pour prendre ta commande et celle qui s’affale sur le comptoir pour t’expliquer en détail la recette de sa salade de quinoa, le tout en t’affectionnant de petits sourires mielleux, difficile de résister. Sans compter la réplique vivante de Barbie qui te sert ta bière en remuant ses mèches blondes… Bref, je m’égare, mais l’amabilité des serveuses a été pour beaucoup dans mon intérêt pour la gastronomie. Pour toutes les gouines courges, Stockholm est une destination immanquable, pour déguster du ligön, du renne séché, du saumon mariné ou de la korv (saucisse).
Haute gastronomie
-Instant précaire- Stockholm est une ville chère. Très chère. A côté, Londres, c’est donné. Comptez 4,50 euros pour un ticket de métro, 7 euros pour un sandwich, 12 euros pour un musée. Heureusement, de nombreux snacks jalonnent la ville. On peut y manger pour un prix abordable des köttboullar (boulettes ikéa) et il est très facile de louer des vélos (comptez 12 euros par jour ou optez pour les vélibs’ locaux). Si on fait fit de ces menus détails, Stockholm a tout du havre de paix. L’ambiance décontractée, la lumière diffuse, les nuages bas, la chaleur des locaux… Je quitte la Suède l’esprit (et le portefeuille) léger.
Lubna