Becoming my own muse a besoin de vous

Lumière sur le livre qui regroupe les collages de Morgan.e, artiste queer et handi et de la campagne Ulule.

Etre queer et handi, c’est être invisibilisé.e au sein même de sa communauté et être invisibilisé.e de partout.. Aussi quand on a sa place nulle part, on la crée. C’est tout le propos du livre Becoming my own muse de Morgan.e qui prend sa place dans l’histoire de l’art. Morgan.e se place avec son fauteuil dans les oeuvres d’art.
Mais ne nous y trompons pas, ce n’est pas juste une question de visibilité. Les handicaps sont exclus de toutes les sphères de nos vies et quand ils ne sont pas synonymes de malheur et désolation ils sont instrumentalisés pour émouvoir et renforcer le sentiment de supériorité des valides. Alors Morgan.e fait bien plus que prendre une place, il redéfinit le beau, questionne la légitimité du validisme et broye la déshumanisation des personnes handi.
Il vous reste quelques jours pour soutenir son projet grâce à sa campagne Ulule !
Rencontre.

Salut Morgan.e. Ton livre s’intitule Becoming my own muse. Muse, détourné par le patriarcat, renvoie à l’éternel féminin alors que le terme provient de mos, moris, latin et qu’il signifie ce qu’il convient de faire. Quand on a pas sa place on la crée. Elle est comment ta place ? Tu ressens quoi aujourd’hui que cette place s’incarne ?
Disons que question représentation en France y’a pas eu de gros progrès. Le téléthon existe toujours et c’est toujours la seule représentation mainstream que les gens ont de nous. De fait, J’ose même pas regarder les productions audio-visuelles françaises tant elles font peur. Par contre à l’international quelques séries vraiment chouettes sont sorties comme la série
argentine 1m20 qui était visible sur Arte.

Ceci dit ma place dans le monde de la peinture figurative est toujours inexistante. Il existe (et il a tjs existé) des artistes handi.e.s qui questionnent et politisent le handicap dans leur travail comme Panteha Abareshi ou Benoit Pieron. Mais en terme de représentation picturale je ne connais personne.

Est-ce que tu utilises uniquement des œuvres qui te touchent et que tu aimes ? Ou aussi des œuvres reconnues et importantes dans l’histoire de l’art ?

Au début du projet j’utilisais des grands noms, ou en tout cas des artistes que je connaissais. Et de fait c’était que des mecs (à part Frida Kahlo). Quand je me suis rendu compte de cette invisibilisation des femmes artistes je me suis dit que j’allais prendre un contre-pied et travailler qu’à partir de leurs œuvres. Ca m’a permis de découvrir plein d’artistes !
Et oui à chaque fois je choisi en fonction de ce qui m’appelle.

Un fauteuil pour 3, la PMA pour toustes ; collage numérique fait à partir des œuvres d Alice Neel

Il y a très peu d’œuvres d’art qui parlent et représentent les handicaps. Placer ton fauteuil au milieu de ces oeuvres, est-ce aussi une manière de redéfinir le beau ?
Oui clairement créer et placer mon fauteuil était une façon de redéfinir la beauté. Et de normaliser cette objet qui porte en lui tant de tragédie dans les yeux des valides ! Ce qui est marrant parce que pour nous, les concerné.e.s, il est aussi symbole de liberté, d’autonomie.

Tu dis : « Il s’agit pour moi de proposer d’autres narrations qui ne soit pas centrées sur le corps valide ; d’imaginer une histoire de l’art dans laquelle moi et mes semblables nous existerions. ». Est-ce qu’il y a des œuvres où tu as pu t’identifier ?
Ou tout est à créer ?
En tant qu’handi la seule artiste à qui j’ai pu m’identifier c’est Frida Kahlo. On a un vécu similaire à certain égard (les souffrances médicales, le fait d’avoir été alité, l’opération du dos, les corsets..) Après être handi c’est une partie de la personne que je suis, je ne suis pas que ça donc évidemment que j’ai pu me retrouver dans d’autres œuvres.

« Moi en Sex party »
Collage numérique fait à partir des œuvres de Carol Rama

Créer c’est aussi rendre réel l’espoir. Quels ont les tiens ?
oh wow quels sont mes espoirs ! La fin de la hiérarchisation du vivant (du racisme, du sexisme, du validisme, du spécisme, des lgbtphobies ..) Mais bon c’est un peut être un peu naïf, en tout cas je pense pas que je le verrais de mon
vivant ..Un peu déprimant comme mot de la fin sorry. Ceci dit ça veut dire qu’il reste de la place
pour la lutte et donc création !

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Delphine

Extraterrestre passionnée de métaphysique et de pizza, elle parle de féminisme, cinéma et surtout de l'invisible.