Typologies #4 L’intello.

On est jamais trop bien informé. Afin d’apporter ses services à la grande communauté des filles et vous permettre d’éviter rendez-vous foireux et baises minables, Barbi(e)turix développe sa propre base de données systématisant les meilleures et les pires du Wild lesbian World. Aujourd’hui découvrons le profil type de l’intellectuelle.

 

Nom ? Sarah Dirossi Felstein

Où la trouver ? Dans les principales bibliothèques de Paris. Le Lundi, probablement à Sainte-Barbe où elle se rend après son CM de « Lecture genrée de l’hyper sexualisation des milieux carcéraux français sous le régime de Vichy ». Le Mardi, préférez plutôt Sainte-Geneviève, le cadre, plus avenant, est davantage propice à l’immersion dans l’œuvre monumentale de Lakmi Grechtik, ce grand peintre birman du 15ème siècle. Les autres jours de la semaine, tentez les médiathèques et autres vidéothèques de la municipalité : la gouine intello aime le peuple. Et le week-end, vous me direz… Le Dimanche, à 16h, il est fort probable que vous la croisiez à la Mutinerie. Si c’est le cas, armez-vous de patience, elle ne détournera les yeux qu’une fois la lecture en braille de la version finnoise du dernier livre de Marie-Hélène Bourcier achevée. Notre conseil : entre-temps, essayez le libanais d’à côté.

A quoi ressemble-t-elle ? L’intello « zéro défaut » étant énervante et de toute façon assez rare, penchons-nous sur un cas un brin plus répandu : l’intello coincée. Oui, c’est presque un pléonasme. Mais attention, « coincée » n’est pas l’exact antonyme de « bonnasse ». « Coincée » est un attribut qui se veut caractériel chez la gouine intello. Vous le décèlerez dans la raideur assumée de sa démarche, dans le sérieux de ses intonations, dans la gêne qu’occasionne chez elle une conversation s’aventurant à la frontière des conventions et de la bienséance, dans cette façon quasi systématique qu’elle a de vous reprendre, l’air agacé, quand vous venez de butter lamentablement sur un subjonctif imparfait. Notre conseil : achetez-vous un Bescherelle.

Bon ou mauvais coup ? Sur cette question, il y a deux écoles qui s’affrontent : soit elle est coincée dans ce domaine également, auquel cas il devient inintéressant à explorer. Soit elle se révèle aventureuse, dangereuse voire complètement barge. A ce moment-là, il faut foncer les yeux fermés et les mains ligotées, ça vaut le détour… Et quel détour !

Comment la serrer ? S’avancer d’un pas ferme, lui tendre votre numéro de téléphone et uniquement le numéro. Surtout ne feindre aucune émotion. Trois jours après, elle vous proposera un verre parce qu’au fond d’elle, il y a une Madame Bovary qui en a marre de rêver sa vie en s’accoudant aux fenêtres. Vous êtes l’aventure qu’elle attendait. Le jour venu, soyez romanesque, ne faites pas dans la demi-mesure, forcez les traits. La gouine intello n’aime pas la demi-teinte. Offusquez-vous de voir fleurir des Musso et des Levy dans les kiosques, indignez-vous de ce piètre patriarcat qui continue à sacrifier l’Egalité sur l’autel de la dictature du « sexe fort ». N’approuvez aucune de ses prises de position, affirmez toujours le contraire. Pointez ses contradictions. Emmerdez-la, en définitive.

Comment la larguer ? Au moyen d’une lettre, évidemment. Surtout, ayez le sens de la formule. Si vous n’êtes pas douée, un rapide détour par du Laclos ou du Balzac peut s’avérer d’une grande utilité. Orchestrez votre lettre de façon à l’inculper d’une charge, aussi minime soit-elle. La gouine intello ne supporterait pas qu’on la quitte sans la blâmer. Aussi, veillez à vous étaler longuement sur ces mois de passion désormais révolus. Attachez-vous à ressasser dans le moindre détail des instants qui lui tiennent à cœur. Tous vos efforts de style et de syntaxe doivent converger vers un même objectif : que ses pleurs entachent votre plume. Sachez-le, la gouine intello adule les ruptures cérémoniales.

On évite de lui dire : J’ai adoré le dernier livre/film/tribune de V. Despentes sauf si on a 10 heures à tuer.

On lui dit : Je crois que dans une autre vie, j’ai vécu avec toi, Duras, Sagan, Austen, Yourcenar, Preciado et Woolf dans un joyeux bordel des années 20.

 

Rania