– « Mais je sais que tu es lesbienne, ça fait des années que je m’en doute. »
Voilà ce que ma mère m’a répliqué quand, les yeux bouffis d’émotion et les jambes flageolantes, je lâchais enfin un « je suis lesbienne », retenu depuis trop longtemps en travers de ma gorge.
– « ….Comment ça tu t’en doutes ?! »
Les parents sont loin d’être stupides. On s’attend tous à lire la surprise sur leurs visages décomposés lors de notre coming-out. Mais ce qu’il faut comprendre, c’est que Papamaman vous ont probablement déjà démasqué, vous qui dissimulez votre homosexualité comme un secret de polichinelle.
Si ce n’est pas le cas, soit vos parents sont des bigots de premier ordre (j’entends par là naïfs au premier degré, adorateurs maladifs des saints textes religieux, Bible, Torah, Coran et autre politique de l’autruche) soit c’est que vous n’avez tout simplement aucun intérêt à leurs yeux et dans ce cas une psychanalyse vous est fortement conseillée pour les années à venir.
Vous croyez donc les duper mais si vos parents ne se doutent pas de votre prédisposition à vivre dans le péché, ils vous imaginent certainement en phase de recherche d’orientation sexuelle. Car si nous possédons le fameux « Gaydar » – ce 6 ème sens qui nous permet de sonder le potentiel lesbien ou gay d’un quidam alentours – eux aussi sont dotés de ce petit supplément ‘anthropologique’, une sorte d’instinct parental qui nous rend aussi opaque qu’une bouteille de Cristalline.
Qui n’a jamais eu droit au fameux regard « Tu sais que je sais ce que tu sais » venant d’un membre de votre famille? Sans parler des blagues foireuses de votre beau-père, des regards gênés de votre frère quand vos grands-parents s’étonnent que vous n’ayez personne (au bout de 20, 30 ans, ça commence pourtant à faire louche). Plus commun encore, l’acharnement de votre belle-mère qui fait une mine renfrognée quand vous ne lâchez pas des « beau gosse ! » devant chaque foutu mec qui se présente devant vous. A l’usure, ça peut rendre fou.
Lorsque le non-dit est réciproque, la situation est relativement facile à gérer. « Don’t tell, don’t ask », comme dans l’armée US, c’est ce que j’ai fait des années avec ma famille. Mais quand le silence devient source d’incompréhension, de tension et de malaise, la seule solution c’est de parler.
Le but de cet article, ce n’est pas une solution miracle au coming-out parfait (le gâteau arc-en-ciel semble être le pire de tous !), une accumulation d’idées pour faire comprendre à votre famille que la seule chose qui vous intéresse ce sont des filles, ou encore une incitation à vider votre sac.
On peut évidemment décider de laisser ses parents de côté. De considérer que cela ne les regarde pas. Quitte à les mettre sur le banc de notre vie.
Mais balancer sa sexualité à ses parents, en plus d’être un acte libérateur et profondément politique (si si, « le privé est politique »), permet d’éviter certains couacs si vous vous faites prendre la main dans le sac. Comme par exemple, de se faire courser par son père avec un hachoir dans toute la maison ou de subir les soupirs d’exaspérations constants et les « nom de dieu qu’est-ce que j’ai bien pu faire pour mériter ça » de votre mère.
An Si