Holly Falconer, le queer en finesse.

Holly Falconer est une photographe anglaise de 27 ans qui prend en photos à peu près tout ce qui l’entoure. Ce qui l’entoure à l’occasion de son expo Technicolour Hymn au XOYO à Londres, ce sont ses amies queer, les filles dans les soirées, les couples… Elle travaille également pour des magazines de mode et a créé plus célèbre site destiné aux lesbiennes en Angleterre : The Most Cake.

Une fille qui, n’ayons pas peur de le dire, ferait sûrement partie des Barbi(e)turix si elle était à Paris.

Je l’ai rencontrée dans un café autour de Dalston, quartier branché/Bobo mais néanmoins détente de l’est de Londres. Une heure de discussion intense autour de l’art et la photographie, de la scène lesbienne Londonienne, de la musique et de l’asexualité. Oui, une discussion de qualité et une jolie rencontre que j’ai essayée de traduire.

Quand as-tu commencé la photographie ?

Il y a environ trois ans, mais je suis devenue professionnelle l’année dernière. J’ai étudié la littérature (uk) à l’université de Londres et j’ai eu un diplôme de journaliste. J’ai ensuite travaillé pour le Gay Times puis pour Diva magazine (un des plus important magazine lesbien d’Angleterre NDLR). C’était assez drôle ! J’ai ensuite été éditrice des visuels et photos et là, je me suis rendu compte que je voulais produire moi-même des images. Je suis devenue l’assistante d’un photographe et puis d’un autre, et je suis finalement devenue photographe.

Dans mon travail, J’essaye de rendre les choses ordinaires intéressantes… Tout est susceptible d’avoir un intérêt esthétique. J’ai également eu une éducation assez religieuse donc la spiritualité à une forte influence sur mon travail : les vitraux d’Eglise par exemple, qui sont très colorés et fabriquésavec cette ombre graphique que j’essaye de retranscrire dans mon travail. Je suis inspirée par les couleurs en général et j’aime la manière dont les Anglais sont excentriques, j’essayede le montrer dans mes captures. J’aime aussi la possibilité de photographier les personnes qu’on ne voit jamais dans les médias : les couples de filles ou encore les asexués.

Tu mentionnes la religion, est ce que c’est facile de mélanger queer/gay scene et religion ?

Oui c’est assez paradoxal, mais j’aime photographier les LGBT en les transformant en icône ; leur propre icône, exactement à la manière des icônes religieuses, en les faisant paraître très importantes à l’intérieur de leur monde. C’est aussi un peu le même principe que lorsqu’on voit quelqu’un de très attirant dans un club : l’image et la personne deviennent importantes pour vous et à l’intérieur de votre monde, comme s’ils avaient une lumière sur eux. J’aime montrer comment les gens peuvent être représentés comme important à l’intérieur de leur univers.

Tu as créé le Website the Most Cake en 2008 – 2009 ?

Oui, à la base nous avions décidé, avec quelques amies, qu’il serait intéressant d’avoir une sorte de blog qui confinerait les films que nous voulions voir ou que nous conseillerions à nos potes de voir, les bons plans de soirées, de concerts, des choses comme ça… Donc au début c’était vraiment un truc simple. Puis c’est allé assez vite : il existait déjà des magazines lesbiens comme Diva ou G3 qui étaient des magazines imprimés, mais nous voulions refléter quelque chose de plus Londonien, qui présente plus nos intérêts. Il y a vraiment une émulation créative au sein de la scène East Londonienne, tout le monde semble avoir de l’ambition, que ça soit artistiquement mais aussi professionnellement parlant.

On voulait aussi faire quelque chose de drôle. Ensuite, on a vite eu la possibilité d’interviewer et de photographier des gens qu’on adorait, comme JD Samson ou Beth Ditto. Puis la raison qui nous à fait continuer au fil des années était que les gens revenaient vers nous avec plein de retours très positifs. Ça nous a aussi donné l’occasion de créer des soirées et de faire venir des super artistes.

Te considères-tu comme une photographe féministe engagée politiquement ?

Oui bien sur ! La photographie a toujours eu un rôle sociétal et politique très important. Dans mon travail de photographe de mode, j’essaye toujours de ne pas travailler avec des modèles trop maigres ou trop jeunes ; et quand je fais les retouches, j’essaye de faire quelque chose de réaliste. Je pense que l’industrie de la mode va, elle aussi, se tourner vers cette tendance, ce que je trouve très positif. Je travaille avec des modèles de toutes tailles et de toutes nationalités. Là où je rejoins le plus les théories féministes, c’est que, lorsque je prends une fille en photo, je n’essaye pas de la rendre plus belle ou vulnérable qu’elle ne l’est: je passe outre les stéréotypes de genre pour livrer la femme telle qu’elle est réellement.

 

Tu as un projet sur les Asexués, peux-tu nous en dire un peu plus, comment t’es venues l’idée?

C’est à la base un projet commun avec mon ami Mark qui étudie la sociologie comportementale des adolescents, nous avons commencé une sorte d’ouvrage avec des écrits et des photos. J’ai trouvé cela très intéressant pour de nombreuses raisons : d’abord parce que, pour eux, le fait de s’assumer comme asexué est quelque chose qui change vraiment leur vie, les rend beaucoup plus confiants et heureux. C’est aussi quelque chose dont on ne parle que depuis récemment. Le fait qu’ils soient de plus en plus visibles est aussi quelque chose issue et relié à Internet : c’est grâce à Internet qu’ils se rencontrent et c’est vraiment un des reflets positifs qui montre comment internet relient les gens entre eux, d’une manière très positive. Sujet qu’il m’intéresse aussi d’étudier. L’asexualité est aussi importante pour moi car, à la manière des personnes LGBT, c’est un combat perpétuel pour la reconnaissance et le respect. Les asexués que j’ai rencontrés ont tous partagé le rejet et l’incompréhension, ainsi que l’obligation de se justifier constamment.

De plus, dans un contexte d’hyperconsommation sexuelle, cette tendance est complètement incomprise et souvent mal interprétée.

 


Plus d’Holly ici >> www.hollyfalconer.com 

 alisa-gallery.com 

Traduction et interview : Géraldine