À quand un hymne féministe 3.0?

On veut snaker le 8 mars. Tu vois pas, ce petit mouvement façon modernjazz de la tête aux fesses? Un hymne féministe existe bien mais il est en l’état peu propice à ce genre de manifestation physique de joie. Du coup on part à la recherche d’inspi pour un hymne féministe 3.0 avec un cahier des charges précis : un tiers véner deux-tiers déter, ou l’inverse, 100% bouge-ton-boule, giclette d’allégresse en continu, empowerment et badasserie. Par ici nos propal.

Point de départ : oui il existe un hymne féministe, L’Hymne des femmes, une création collective qui voit le jour à Paris en 1971, devenue l’étendard sonore du MLF et des luttes féministes. Extraits  :

Asservies, humiliées, les femmes,
Achetées, vendues, violées,
Dans toutes les maisons, les femmes,
Hors du monde reléguées.
(…)
Seules dans notre malheur, les femmes,
L’une de l’autre ignorée,
Ils nous ont divisées, les femmes,
Et de nos sœurs séparées.

Il est très bien cet hymne, il est construit sur un principe de contre-discours, il est dans son jus. Jus de quoi je ne saurais dire (salsifi ? Hyper tendance dans les années 70 -oh ça va, on peut s’auto-dériser hein…). Tu le vois le problème ? Oui tu le vois. Le refrain, c’est « debout, debout », perso, ce sera « assise, assise », voire couchée avec couette, chat, chaussettes, bouillotte, huile essentielle de Ravintsara -ouais c’est pas encore l’été- et une Tequila sunrise, pour les couleurs, et aussi pour oublier…
On a besoin d’un nouvel hymne, un hymne où on pourrait bouger le boule en toute joie, on envoie, on est fières, on y va, un truc qui prend aux bulbes vestibulaires direct, au cuir chevelu, aux pieds, partout.


On se souvient de cet opus incroyable réalisé dans le sillage de la marche des femmes à Washington DC en 2017. Ashley Judd y récita un poème de Nina Donovan, inspiré par un débat où Trump avait évoqué Hillary Clinton avec l’expression “nasty woman”. Matias Aguayo et Valentina aka Valesuchi avaient mis en sons ce texte. Une petite pépite.

Côté hexagone, Petra Pied de biche est une source tout à fait explicite d’inspiration. A ressortir en toute occasion domestique ce petit laïus très dansant « je n’ai pas appris à faire la vaisselle et je n’ai pas la fibre auto-didacte » de « Boniche », et sinon tout de « Bébé » séduit, la musique, le clip. BTW, Petra a sorti un nouvel album, Rage de raison…

On suit aussi l’inspi du duo foutraque PointPointVirgulePointvirguleCrochetParenthèse dont le « Jean-Victor, je veux ta mort » peut fournir une piste qui reprend le principe du contre-discours. En revanche pas sûre que ça fédère tout à fait, la dimension symbolique des paroles pouvant échapper à un public non initié. On se repassera la réponse de la bergère-mama au berger-daddy, un délicieux suggarmama donc.

Avec un côté délicieusement barré également, Ashnikko, Ashton Casey, USA-London propose un rap inédit résolument féministe, souvent inspiré de sa propre expérience.

Pour une grosse dose de fierté et d’empowerment, pour faire imploser le beach body, chacune dans son style, sa sphère, sa musique, on adore aussi d’un côté Mona Haydar qui lance « Make a feminist planet/Women haters get banished » dans « Wrap my hijab » ou Miss Eaves qui fait l’éloge de la cuisse libre dans « Thunder Thighs ».

Grosse joie aussi dans la musique de Madame Gandhi, dont nous appréciâmes au plus haut point le « The Future is Female » de 2016 avec un remix pas piqué des hannetons l’année suivante.

La multi-talentueuse Kiran Gandhi propulse en effet un univers maxi-syncrétique, un joyeux bazar musical qui à la fin marche au cordeau, riche et ciselé. « It’s my year to be free/From what’s botherin’me » c’est la devise du morceau en hommage à l’afrobeat du Dieu Fela intitulé « Bad Habits ».

On n’oublie pas de revenir aux sources en puisant au TLC canal historique « Ain’t 2 Proud 2 Beg », ou au riff obsédant de Sleater-Kinney dans « I wanna be your Joey Ramone », parce que « I’m the queen of rock and roll » reste une affirmation sobre et simple à s’approprier d’urgence même si tu fais pas de musique, et surtout si tu fais pas de musique en fait.

Voilà, l’appel est lancé.

Y’a plus qu’à!

Et pour une histoire du 8 mars, c’est par ici.

Isabelle Mornat

Isabelle aime les cabinets de curiosité et la vieille techno hardcore, la confusion des sens et les concentres Harley au clair de lune.