Le sextoy de la discorde

La toile bruisse avec cette histoire, sur votre fil d’actu revient le même objet oblong, plus ou moins familier… Un sextoy primé pour son excellence technologique, puis finalement plus primé. Nous découvrions que l’engin mis à l’index était entre autres « indécent et blasphématoire », des épithètes qui nous ont forcément titillées!

Organisé par la CTA (Consumer Technology Association), le Consumer Electronics Show (CES) est le plus gros salon de l’innovation technologique grand public qui se tient tous les ans à Las Vegas. Le sextoy  baptisé « Osé » de la société Lora DiCarlo est le fruit de recherches en biomimétique et en robotique, huit demandes de brevets ont été déposées à son sujet. Début octobre la CTA informait l’entreprise, Osé gagnait le prix dans la catégorie Robotique et drones décerné par des juges indépendants. A la fin du mois elle revenait sur cette décision et annulait le prix, invoquant une clause de disqualification pour les objets jugés « immoraux, obscènes, indécents, blasphématoires ou ne correspondant pas à l’image de la CTA », ensuite un problème sécurité puis de conformité à la catégorie. Elle refusait même à la société de présenter son produit lors du salon.

Lora Haddock la fondatrice de l’entreprise ouvre un blog le 8 janvier. Elle réfute les arguments de la CTA et pointe le biais sexiste de ce retournement. Elle rappelle que les technologies liées à la sexualité masculine sont bel et bien présentes entre poupée gonflables high-tech et pornographie en réalité virtuelle.

Des sextoys en direction d’un public féminin ont déjà été primés au CES. En 2016, le sextoy connecté Little Bird remportait le prix de l’innovation. Un sex-toy vibrant à la lecture des passages torrides d’un récit érotique. Lora Haddock rappelle que le CES et la CAT ont une longue histoire de sexisme, misogynie, biais de genre et double standard, qui est aussi celle de la tech industry dans son ensemble. Jeudi la CTA annonçait vouloir investir 10 millions d’euros dans des fondations et des entreprises centrées sur « les femmes et les gens de couleur » ou dans des start-up peu présentées.

C’est une équipe d’ingénieur.es LGBTQI qui a réalisé les prouesses du sextoy tout-en-un. Cette situation absurde aura permis à l’entreprise de faire converger un pitch market basique avec une revendication fort bien exposée dans la lettre ouverte à découvrir et à partager largement :

Tout ce que nous faisons à Lora DiCarlo s’appuie sur la sex-positivité et l’inclusion. Nous ne cachons pas ce que nous faisons et nous croyons fermement que nous les femmes, les non binaires, les genres non-straight, et toutes les personnes LGBTQI devons revendiquer haut et fort notre espace dans le plaisir et la technologie, deux secteurs encore largement dominés par les hommes cis-parmi les DG et les cadres. C’est une partie de la vie et de la santé qui devrait absolument être présente dans les discours habituels. Pas de honte, de malaise, juste le confort et la liberté d’être soi-même et de jouir de son propre corps.

 

Isabelle Mornat

Isabelle aime les cabinets de curiosité et la vieille techno hardcore, la confusion des sens et les concentres Harley au clair de lune.