Annulation de The L Word : Generation Q, presque autant que Jenny Schecter, on a adoré la détester

La nouvelle est tombée, le calvaire s’arrête là ! Sortez les mouchoirs, nous n’aurons pas de quatrième saison de The L Word : Generation Q. En effet, la série a été annulée par Showtime.

En France, déjà, c’était mal barré : aucun diffuseur n’a voulu de la saison 3. J’ai d’ailleurs résilié mon abonnement Canal+ en découvrant que même les deux premières avaient été supprimées de la plateforme. Et c’est la tradition maintenant : Sense8, Everything Sucks, The Wilds, First Kill, A League of Their Own, j’en passe et des grandioses…toutes les séries avec des personnages principaux LGBT : annulées. Bon ok ce n’est pas les mêmes plateformes, mais justement ! Pas une pour rattraper l’autre. Et si aucune série Showtime n’a été renouvelée depuis qu’il a été annoncé que le réseau câblé premium américain sera intégré prochainement à Paramount +, on peut quand même déplorer la chute d’une autre série LGBT.

The L Word à New-York ?

Mais mais mais… Nellie Andrée, la journaliste de Deadline rapporte qu’un reboot de la série originale serait « en cours de développement avec la créatrice de la série de 2004, Ilene Chaiken. ». Le titre, pas encore définitif : The L Word : New York. Adieu donc le soleil de la Californie, les lesbiennes veulent maintenant croquer dans la Big Apple ! Le projet va très sûrement en réjouir certaines. Des intrigues superficielles et prévisibles, des personnages considérés comme caricaturaux (souvent perçues comme des pâles versions de leur prédécesseurs en plus jeunes), un milieu toujours très embourgeoisé… Après la conclusion de la saison trois, j’avais vu passer sur Twitter une campagne organisée par des fans pour que Showtime recommence tout. En gros, on veut un reboot, mais pas celui-ci : on efface et on recommence. Restons prudentes néanmoins : on ignore à quel stade en est le projet ! En cours de développement, ça veut un peu tout et rien dire… Mais c’est une petite lueur d’espoir, comme une nouvelle arrivée en ville, une photo de tournage, un message de ton exe…

 

Il est temps de tourner la page

Les personnages de la Generation Queer nous auront-ils autant marqués que les goudous des années 2000 ? Certainement pas. Mais parce que, malgré tout ce que j’aurais à lui reprocher (au hasard son problème dramatique d’écriture…)  j’ai suivi religieusement chacun des épisodes, je me devais de dire au revoir correctement.

Pour les non-initié·es et les puristes qui n’ont pas regardé par principe,  The L Word Generation Q, c’était quoi ?

The L Word Generation Q est une série télé américaine en 28 épisodes développée par Marja-Lewis Ryan qu’on a découverte dans le film The Four-Faced Liar pour lequel elle était actrice, co-scénariste et co-réalisatrice. Elle s’inscrit dans la continuité de la série originale, The L Word (2004-2009) créée par Ilene Chaiken, Kathy Greenberg et Michele Abbott. La série a été diffusée à partir de décembre 2019 (j’étais devant mon ordinateur surexcitée.) et on a assisté à la dernière saison avant son annulation en janvier 2023 sur Showtime.

Comme le dit Alice, l’un des personnages récurrents qui revient dans ce reboot, dans son épisode d’ouverture « I feel like it’s been a decade » et précisément ça fait dix ans qu’on a retrouvé (ATTENTION : SPOILER) le corps sans vie de Jenny dans la piscine. À Los Angeles, on retrouve trois personnages emblématiques. Shane jouée (Kate Moennig) rachète le Dana’s, le bar emblématique de la série. Alice (Leisha Hailey) est à la tête de son propre talk show. Enfin, Bette (ma préférée !!) incarnée par Jennifer Beals, est en pleine campagne pour être mairesse de la ville (on n’en attendait pas moins.). La nouvelle génération nous est d’abord introduite par le boulot : Finley et Sophie bossent pour Alice, Dani laisse son héritage familial pour s’engager dans la campagne de Bette, Tessa tient le Dana’s. On s’attache aussi à Micah, le coloc timide de Sophie et Fin, Alice atterrit dans un trio amoureux avec Nat (thérapeuthe au Centre LGBT, où travaille aussi Micah) et son exe femme Gigi (agente immobilière, magnifique, intimidante, charismatique, que dire…). Comme de vieux amis de la famille qui auraient perdu le contact au fil des années, on se rappelle d’Angie (la fille de Bette et Tina) «GRANDE COMME ÇA !» Et on s’étonne de la retrouver adolescente, à l’aube de l’âge adulte. La série se voulait être une version moderne de l’originale : plus ouverte, plus queer, plus au fait des questions de représentation.

Dernière conversation

Bon, on ne va pas se le cacher, en tant que fans de la série originale Génération Q n’a pas su réinventer ce qu’on adorait dans The L Word : c’était audacieux, sans compromis. La génération queer, qui aurait pourtant dû nous ouvrir tout un monde de nouvelles possibilités s’est montrée plutôt timide. Ok, c’était assez respectueux et la série a fait son Mea-culpa à plusieurs personnages notamment, Max, un mec trans qu’elle avait clairement maltraité en 2005 pendant sa transition. À part ça quoi ? Elles sont toujours riches, voire même encore plus riches… Et par nous, ces corps normés… Ne sont toujours pas les nôtres et on a souvent la sensation de personnages-jetons de diversité. Au final, on s’est retrouvées avec des chiffres en baisse au cours de ses trois saisons.
Pour autant, c’était notre petite madeleine de Proust en version rafistolée, notre petit plaisir coupable à nous, une occasion de nous retrouver, de nous refaire des marathons, d’enflammer les réseaux sociaux et refaire la célèbre toile d’Alice sur Twitter… Et il faut dire que la série va nous manquer un peu.

En laissant derrière moi La Gen Q j’ai l’impression de quitter une relation toxique. Quand tu sais que tu te fais du mal, que le truc empire d’épisode en épisode, que les personnages t’énervent, la mise en scène t’agace, les dialogues t’insupportent… Mais que tu restes quand même… Parce que t’es attachée, que vous avez une histoire, que t’as grandi et changé avec ses personnages et puis aussi parce que tu ne t’en vantes pas, mais tu l’aimes bien quand même. J’aimais bien, je crois, que ce soit mauvais, que leurs problèmes soient ridicules, qu’elles fassent n’importe quoi… Moi, je voulais m’extasier devant la relation Dani et Gigi et hurler sur mon ordinateur en voyant les showrunners la ruiner. Je voulais commenter tout le mariage de Bette et Tina en suivant les reviews YouTube. Je voulais pester pendant vingt minutes avec mon date sur les propos plus que déplacés d’Alice ou cette façon ridicule qu’ils ont eu d’aborder le polyamour… C’était ça pour moi la Gen Q : un enchaînement de maladresses, des tentatives ratées et surtout, surtout, des sujets de conversation ! Des questions, des occasions de se retrouver, de se dire « on peut faire mieux que ça » et « on devrait écrire là-dessus » ou bien « t’as vu ce film ? Ils en parlent dedans justement ». La Gen Q, c’était de la représentation, pas terrible certes, mais qui touchait une large audience, qui reprenait des codes qu’on connaît et qui rassurent, qui laissait de la place à l’imagination. Qu’est-ce qu’on pourrait faire d’autre ? Qu’est-ce qui fonctionne ? Parce qu’il a des choses qui ont fonctionné, soyons sérieux : la question de l’identité raciale abordée avec Angie, plus de personnes trans au casting, l’évolution de Shane, l’existence même de Gigi… The L Word génération Q c’est du soap-opéra et ce genre-là est devenu de plus en plus méprisé face à des série plus intellectuelles, plus sérieuses, plus safe… Mais c’est bien ça qui fait tout son charme, c’est léger, c’est maladroit et c’est mélo. Le show n’avait pas besoin d’être révolutionnaire, il était amusant et amusant, c’est une victoire en soi.

Génération Q c’était notre Grey’s Anatomy à nous et moi, ben, j’aurais bien aimé que ça continue.