Lesbiennes d’ailleurs : Costa Rica

Barbi(e)turix part en voyage ! Et comme vous êtes des petites chanceuses, on vous emmène avec nous pour vous faire découvrir des contrées lointaines comme si vous y étiez. Pour mieux vous situer les choses, « on » c’est en fait Hannah, qui a décidé de partir à l’autre bout de la planète, pour vous faire découvrir les lesbiennes d’ailleurs, et plus précisément celles d’Amériques du Nord et Centrale, via des récits palpitants et quelques photos.

Pour un portfolio plus extensif, rendez-vous sur Dailimages, et pour les étapes précédentes c’est ici.

On quitte le Nicaragua pour quelques temps afin de découvrir le Costa Rica, seul pays de la région faisant partie du « premier monde » (expression consacrée par les locaux, impossible de ne pas être mis face à son privilège ici). Le pays fonctionne aux énergies renouvelables et n’a pas d’armée. Pour la première fois je vais m’éloigner des centres urbains, ce qui complique assez ma recherche de lesbiennes, soyons clairs ! J’aurais du m’en douter, puisqu’en Amérique Centrale les horaires sont surtout décoratifs. Mon bus arrive avec trois heures de retard, et non seulement mon premier taxi m’arnaque (un classique), mais la première lesbienne que j’avais prévu de rencontrer ne peut pas m’attendre.

Pas grave, je file le lendemain à Utila pour passer le 31 avec des amies françaises : finir l’année par un sublime coucher de soleil sur le Pacifique s’avère plutôt sympathique (euphémisme, bonsoir), tout le village est là pour le spectacle. Le lendemain direction Sámara, sur la péninsule de Nicoya. Ça y est, j’ai trouvé mon coin paradisiaque (pas encore détrôné à ce jour) ! Je mets tout sur pause pour quatre jours, passe mes journées à lire, jouer dans les vagues, et cramer au soleil. J’ai essayé d’étendre au maximum cette visite de l’éden, mais le devoir et les lesbiennes m’appellent, et je finis par reprendre la route de San José à contrecœur.

Heureusement mes trois jours citadins sont bien remplis ! Première interview dès potron-minet le lendemain, avec Maylith. Elle a tout juste 20 ans et est déjà out (les coming out si jeunes sont assez rares dans la région). Selon elle, si tu es dans les « bons cercles » ce n’est pas difficile d’être gay ici. Pour elle, rejoindre lesdits cercles s’est fait en proposant ses services aux organisateurs de la gay pride de San José, tout simplement. Du coup elle me donne à voir une expérience plutôt positive de la vie d’une jeune lesbienne de la capitale, pas si différente d’une expérience parisienne, ça « tinde » et ça sort.

Maylith

Grâce à Ara (la raison de l’extension de mon séjour au Nicaragua), j’ai l’occasion de rencontrer les « célébrités » lesbiennes locales que sont Lalay et Jaz (toutes les autres filles m’en ont parlé !). La raison ? Elles sont mariées, légalement, dans un pays où le mariage gay n’est pas autorisé. Mais comment ?! Grâce à une erreur sur le sexe de Jaz dans ses papiers. Evidemment, dès que la supercherie a été découverte, l’administration s’est empressée de se lancer dans une procédure d’annulation. A l’heure de cet article elles font face à deux actions : l’une du ministère public à leur encontre pour fraude à la loi, et la leur, en inconstitutionnalité du code de la famille, dont l’article 14 interdit explicitement le mariage gay. Le plan est a priori de perdre cette seconde action et se rendre ensuite devant la commission inter-américaine des droits de l’homme. En attendant elles sont toujours mariées et bossent dans leur restaurant végétarien.

Lalay et Jaz 

Les interviews s’enchaînent ensuite, Erika me retrouve à leur café, nous papotons puis allons dîner, Fabiola nous rejoint, et nous allons visiter le plus vieux bar lesbien de la ville, Castilla, mais il n’y a personne et c’est un peu glauque comme ambiance. Erika vient du Mexique, de Ciudad Carmen dans la péninsule du Yucatán et elle est ici pour connaître ses racines Costa Ricaines. Naturellement je lui demande un petit exercice comparatif, et elle me dit que pour elle c’est bien, bien plus simple d’être lesbienne ici que là-bas car ici elle vit dans une capitale alors qu’elle vient d’une petite ville du sud du Mexique, région loin d’être aussi moderne que Mexico City. Fabiola est prof d’espagnol donc je l’assaille de questions de grammaire, puis on va voir l’une des boites gay de la ville. C’est assez kitsch, mixte et hétéro-friendly. Elle trouve que mon projet est une idée super cool, si ça permet de voir qu’au fond on n’est pas tout.e.s si différent.e.s. Et après cinq mois de voyage, je confirme évidemment, on ressent vraiment comme une sorte de communauté lesbienne mondiale, dont les grandes lignes se recoupent, bien que le quotidien soit différent.

 

Erika

Avec Odalys par exemple, on s’est toutes les deux rendues compte qu’on préférait les filles grâce à un film (Imagine Me & You pour elle, L’Auberge Espagnole pour moi). Odalys vit ici depuis qu’elle a 13 ans, en provenance de Cuba. L’exercice comparatif est donc un peu délicat, mais elle m’informe que la fille de Raúl Castro gère un projet sur les droits LGBT. Selon elle, de toute la région, c’est au Costa Rica qu’il est plus facile d’être homo, simplement parce que le niveau d’éducation est plus élevé, et que tout commence par là. Le pays reste tout de même assez religieux et l’avortement n’y est pas légal. L’après-midi Rachel vient me chercher pour m’emmener voir les hauteurs de la ville. On se connaît depuis 15 minutes quand je me retrouve sans pantalon ! J’ai été victime d’une attaque de fourmis après m’être malencontreusement assise chez elles ! On ne fait pas d’interview formelle mais on échange sur nos histoires de cœur récentes, comme si on était potes depuis longtemps, elle est amoureuse de sa meilleure amie notamment, classique.

Odalys

Enfin la dernière est Maye, que j’ai aussi rencontrée grâce à Ara, car elles sont sorties ensemble il y a quelques années (so lesbian!), mais c’est l’une des rares lesbiennes à ne pas être amie avec ses ex ! Elle est out auprès de tout le monde et trouve que c’est assez simple d’être homo ici parce que les ticos [habitants du Costa Rica, ndlr] pratiquent l’indifférence à peu près par rapport à tout.

Maye

De retour à l’hôtel je ne prends pas le risque de dormir par peur de louper mon bus de trois heures du mat’, et je passe le temps en retrouvant Cécile de France, pour un visionnage longtemps repoussé de Casse-Tête Chinois. Si elle savait que ça fait plus de dix ans qu’elle m’accompagne dans ma vie lesbienne ! Allez hop, retour à Managua pour deux mois, je vous avais prévenu que que le train du voyage avait déraillé ! La capitale Nica est carrément moche, osons le dire, mais les gens sont ouverts et très cools. Et grâce à moi, vous allez connaître presque toutes les lesbiennes de la ville !

Hannah

Hannah est myope et adore la photo (elle en prend même), le ciné, et lire des livres. Elle admet sous la torture une faiblesse pour Gromit et Federer mais fond devant du Lindt aux noisettes.