We Luv Gouine ⚡️ Kabaret Kings , la rencontre

On vous en parlait déjà il y à 6 ans, depuis les drag kings sont restés à l’honneur. Préparez-vous pour le Kabaret Kings lors du We Luv Gouine la semaine prochaine, ça va être hot hot hot !

Pour l’occasion Louise de Ville et la génialissime équipe du Kabaret Kings vous  ont concocté une soirée haute en couleurs pour cette Pride ! Nous avons rencontré Chriss Lag , réalisatrice du documentaire «  Paroles de King » et Louise de Ville qu’on ne présente plus !

Comment est-ce que vous êtes rentrées dans le monde des kings?  Qu’est-ce qui vous y a séduit ? Est-ce que c’est là que vous vous êtes rencontrées ?

Louise

J’ai commencé à me kinger en 2000, pour participer à une soirée de soutien aux LGBT dans le Kentucky. Je n’avais aucune référence à ce moment-là et j’ai pu inventer mon 1er personnage King grâce à l’aide des dragqueens, on a utilisé la même technique pour fabriquer ma bite que celle pour leurs faux seins  et en renversant leur technique du contouring  pour me donner des traits angulaires et durs.
En arrivant à Paris, en 2005, j’ai fondé le DRAG KING FEM SHOW avec Wendy Delorme et Mister Mister, un trio qui explore les codes du genre et une sexualité queer via la performance, avec une bonne dose d’humour et de paillettes.

Chriss

Mon premier grand évènement King, c’était à Cineffable en 2004. Il y avait un défilé suite à un atelier de Preciado, un concert des Kings du Berry et la projection d’un film super 8 “The undergrad” une parodie de “Le lauréat” ou tous les personnages étaient joués par des Kings ou des Trans. Au départ je trouvais le Drag King juste fun et je me suis attachée à la vraisemblance du masculin dans les performances . Plus tard j’ai compris que c’était bien plus que ça. Et en fait je suis vraiment rentrée dans le monde des Kings en tournant “Parole de King !” à partir de 2013.

Notre rencontre c’était il y a plus de 10 ans, j’étais journaliste pour le magazine lesbien, aujourd’hui disparut “La Dixième Muse”. J’ai interviewé Louise sur son actualité, puis nous avons parlé à bâtons rompus. Elle m’a alors confié l’un de ses plus grands rêves : rencontrer Eve Ansler, l’autrice des “Monologues du vagin”. J’ai réalisé son rêve une semaine plus tard, en l’invitant à m’accompagner à l’Hôtel de Ville de Paris où Eve recevait la médaille de la Ville. Je trouve que c’est une bonne façon de commencer une relation, vous ne trouvez pas ?

 

Louise, on te croise depuis quelques années déjà aux événements barbieturix, tantôt comme Louise, féminine et aérienne, tantôt comme Louis, roulant des mécaniques. Ce double personnage, c’est une manière pour toi de dire que le choix n’a pas à être binaire ? Qu’on peut se réapproprier nos corps et nos attitudes au-delà des normes que nous impose la société?

Louise

Je mets en pratique les principes de la théorie du genre. Judith Butler dit “Le genre est une performance. On peut choisir les accessoires qu’on veut, masculins ou féminins.”J’ai commencé à me kinguer avant de faire du burlesque. Je me suis permis d’explorer une féminité exagérée et consciente une fois que j’ai bien approfondi la masculinité en moi. Aujourd’hui, dans ma vie de femme, j’assume davantage ma virilité dans l’espace public. Et je crois qu’on fait plus attention à ce que je dis quand je parle avec une bouche rouge vif. »

 

Tout le monde ou presque connaît et sait ce qu’est une drag queen. C’est moins vrai pour les kings, pourquoi selon vous ? Est-ce que cette moindre visibilité serait liée au fait que les drag queens sont souvent performées par des hommes (plus habitués à occuper l’espace public) ?

Louise

En mimant la masculinité et en se grimant, les drag kings donnent un coup de pied au piédestal sur lequel le patriarcat est perché.  On est la preuve du mensonge que représente le mythe de “l’homme” incarné naturellement et instinctivement, sans apprentissage social ni construction idéologique, nous prouvons que les codes de la domination et de la virilité sont appris.


Chriss

La raison essentielle est effectivement celle-là et cela a beaucoup de conséquences. Les hommes sont ceux qui sont majoritairement propriétaires des lieux festifs et artistiques. Ils en font la programmation et produisent les soirées. Ils s’intéressent quasi exclusivement aux Drag Queens. De plus dans la communauté LGBTQ I+ certains ne s’intéressent pas du tout au King voir s’y opposent violemment, censurent, dévalorisent. Donc même dans les soirées, les spectacles en France, les Drag Kings sont rarement invités, programmés ou payés.

 

Chriss, tu es la réalisatrice du documentaire « Paroles de King », est-ce que ta volonté était justement de donner un espace de visibilité à ces king français ?

Chriss

Ma première motivation était en effet de donner à voir les Drag Kings en France face à l’omniprésence des images des King anglo saxons. Et plus j’ai rencontré de King, plus j’ai compris qu’il y avait tellement de façons différentes d’arriver au king, de faire du Drag et des suites que cela avait dans nos propres vies. Quel que soit l’âge, l’origine sociale, l’orientation sexuelle, l’identité de genre… C’est pour ça qu’il y a 21 Kings dans mon film. Si vous voulez soutenir cette visibilité, vous pouvez d’ailleurs acheter le DVD ou regarder le film en VOD sur filmsdocumentaires.com, cela me permettra de payer les factures restantes.

 

D’où est née l’envie de monter le Kabaret Kings et les ateliers kings ? Quels sont vos retours par rapport à ces ateliers ?

Louise
Je donne des ateliers depuis 15 ans. Je pense que c’est très utile que les femmes décortiquent les codes de la domination qui sont réservés aux hommes par notre société et apprennent à s’en servir à leur profit.
L’envie de monter un spectacle de kings m’est venue naturellement au fil du temps avec l’élargissement de la communauté.

 

Chriss
Kabaret Kings c’est un show qui permet vraiment de les rendre visibles, puisque c’est un spectacle 100 % King. Cela nous a permis depuis 2014, aussi de voyager ensemble en France et en Europe pour découvrir d’autres cultures et donner une visibilité internationale à quelques Kings français.

 

Au-delà du côté festif et ludique, la pratique du drag king est un acte militant, avec des revendications dernières, c’est important ?

Louise

Je pense que toute expression artistique et personnelle est importante. Il y a des numéros plus militants que d’autres. Je suis contente de voir que les performances des kings se diversifient de plus en plus. C’est super enrichissant et un bon signe de la vitalité de cette pratique !

 

Rien qu’à travers la langue française, on réalise l’importance de la binarité du genre dans notre culture. Est-ce que vous avez eu l’occasion de côtoyer la culture king dans d’autres pays ? L’esprit ou la pratique y est différente ?

Louise

La culture drag king a débuté avec la communauté lesbienne à l’origine, c’est une sorte de théâtre des marginales, quelque que soit le pays. C’est un acte militant n’importe où !

Chriss

Je suis très curieuse justement de continuer à étudier cette binarité du genre en France, mais aussi à l’étranger. Je l’ai fait à travers mon travail autour du Voguing et de la Ballroom scene avec la web série documentaire “Vogueur of Paris” et le court métrage “Hold that pose for me”. Et je souhaite continuer à explorer l’univers Drag King et Queen, à travers l’Europe, sur ma chaîne Youtube ChrissLagFilms.

 

Vous avez des projets pour la suite ? Qu’ils soient communs ou individuels ?

Louise

Juin c’est le mois des King ! J’ai participé le 15 au Patriarchy is Burning au Yoyo et je serai à l’atelier le 22 Juin et  le 28 Juin au Balajo  pour Kabaret Kings !

Chriss

J’ai quelques vidéos pour YouTube en préparation autour des Drag King, des Pride ici et ailleurs. J’espère à l’automne tourner un nouveau court métrage fiction. Vous pouvez voir “Hold that pose for me” que j’ai co-réalisé avec Xavier Hérault le 28 juin  à Toulouse dans le festival REBISH CHAUD et le 29 juin à 19h30 à Nice dans le Festival In & Out.

 We Luv Gouine x Kabaret Kings, vendredi 28 juin à 19h30 au Balajo.

Roxanne Valin

Globe-trotteuse et passionnément tête en l’air, elle adoucit son côté radical par son amour des chaussettes pilou-pilou et des macarons pistache. Elle parle genre, lutte des classes et patriarcat sans invitation. Sa devise « the personal is political »