« Je jouis donc je suis » : l’univers photographique de Sandra Vinet

Sandra Vinet déborde d’énergie, elle a du bagou et l’engagement vissé au corps. Artiste protéiforme, touche-à-tout, elle présente un choix de ses œuvres sous un signe très prometteur, à voir au centre LGBT IDF jusqu’au 10 novembre. Rencontre.

« Je jouis donc je suis » explore, comme le reste de ses clichés jusqu’ici, les rapports entre l’intime et l’extime. Les thématiques découlent de cette circulation essentielle : le corps et ses fluides, ses marques et ses traces, l’affleurement, l’effleurement. Empruntée à la psychanalyse, familiarisée par Serge Tisseron, la dialectique intime/extime travaille à l’œuvre de l’estime de soi. « J’ai compris au fil du temps en digérant, on le gère en le disant, qu’il y a une forme de dialogue entre mon travail et moi, une expressivité collective qui émerge, une porosité, presque une discussion par capillarité entre l’extime et l‘intime », souligne-t-elle. Contre le male gaze, elle retourne l’objectif pour se réapproprier l’image de soi, faire converger le regard dans le regardé.

 

L’artiste scrute et va au plus près du sujet pour faire du détail un paysage inédit, créer une ambiguïté nouvelle. Les couleurs, toujours intenses, sont travaillées en lumière pendant et après la prise. Rien n’est truqué, tout est vrai, dans son intégrité. La jouissance n’est pas qu’une modalité des sens, c’est une façon d’exister, on jouit de ses droits aussi. La visibilisation des fluides a aussi tout à voir avec la fluidité du genre.

Elle est advenue par sa pratique artistique, « j’ai toujours eu l’impression que l’art ça se vivait, c’est l’expérience, je suis dans le champ de l’autofiction, comment on vient transcender une histoire personnelle dans le collectif dans le but de l’échange, d’une rencontre des singularités » précise-t-elle avant de citer quelques-unes de ses influences, Araki, Sophie Calle ou Marina Abramović. Son prochain projet portera sur la mort des êtres chers. Un projet radicalement différent mais toujours au plus près des racines de l’humain et de son existence. « C’est le sujet qui te choisit, je rêve mon sujet, je dors mon sujet ».

Issue du design, elle a exploré la matière par le biais des effets de lumière, une constante. Son parcours professionnel l’a conduite à exercer pour plusieurs marques prestigieuses, un parcours au cours duquel elle a été confrontée au mansplaining, à la confiscation de la parole, à la lesbophobie. La photographe se sent happée par d’autres médias, la musique, l’écriture, l’impression 3D, la vidéo. A travers son travail désormais, sa pratique du design, c’est sur elle qu’elle l’exerce.

Une conférence/débat/finissage de l’exposition dans le cadre du Vendredi des Femmes, exceptionnellement ouvert à tou-te-s est prévue au Centre LGBT Paris-Îdf à partir de 19h30 Vendredi 10 Novembre 2017

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Isabelle Mornat

Isabelle aime les cabinets de curiosité et la vieille techno hardcore, la confusion des sens et les concentres Harley au clair de lune.