Fairies & Boobies, du porno par et pour les femmes

Il y a quelques jours, Roxanne Bee a lancé Fairies & Boobies, un projet collaboratif de porno dessiné par et pour les femmes, qui met en scène des fées qui découvrent les joies de la sexualité.

Fairies & Boobies entend proposer une offre érotique en BD et illustration qui célèbre la sexualité dans toute sa diversité (notamment au niveau des corps, sexualités, couleurs de peau, fantasmes…). Les personnages – des fées donc –  expérimentent toute sorte de pratiquess sous le crayon, le feutre ou le stylet d’une fière équipe de contributrices. Fairies & Boobiesest appelé à vivre avec fougue et ardeur, et sera non seulement mis à jour régulièrement – tous les jours pendant sa première semaine d’existence, et ensuite chaque lundi -, mais aussi ouvert aux nouvelles contributions ! Sa créatrice a répondu à nos questions !

BBX : Qui es-tu Roxanne Bee ?

Roxanne Bee : Alors ! Je m’appelle Roxanne Bee, j’ai 25 ans, je vis à Lyon depuis deux ans, et je suis illustratrice/graphiste. Ces derniers temps, mes deux projets les plus prenants ont été deux livres pour enfants qui vont sortir le 6 octobre : L’étrange É, aux éditions Amaterra, et L’Extraordinaire Almanach de la Forêt, aux éditions du Lumignon.

Pourquoi avoir articulé le projet autour des fées ? En quoi est-ce que cet univers est pertinent pour évoquer la sexualité féminine ?

On voulait laisser la possibilité d’aborder des thèmes et des représentations variées, de manière libérée (au niveau des corps, pratiques, fantasmes…) et partir sur des personnages humanoïdes imaginaires nous a paru pertinent pour amener une petite distance et essayer d’éviter l’autocensure. Le principal avantage des fées, c’est qu’elles permettent de partir dans le fantastique, de montrer des choses qui nous excitent mais qui ne sont pas réalistes, et qui sont difficiles à mettre en scène quand on fait de la photo ou des films (par exemple, dupliquer ses partenaires, se transformer en animal, faire grossir ou rapetisser des organes de manière exagérée, prendre des positions encore plus fofolles, etc). Notre idée était de créer un univers « safe », où la sexualité féminine n’est que positive, riche, marquée par le respect du consentement, indépendante du regard et de la jouissance masculine, pleine de plaisir et de joie, et en même temps assez variée pour que le plus de femmes (et minorités de genre) possible puissent s’identifier…

Est-ce que tu penses que la BD / l’illustration érotique est trop phallocentrée ?

C’est le problème de tout ce qui se veut érotique… et du monde en général d’ailleurs ! On parle peu de la sexualité des femmes – quasiment jamais indépendamment du plaisir des hommes -, on connaît peu leur corps, comment il fonctionne (la majorité des gens confondent encore vulve et vagin) et on le dénigre sans cesse (pas assez beau, pas assez propre, pas acceptable au naturel). On sait à peine ce qu’est le clitoris, à quoi il ressemble et où il se trouve – ce tout récent article le rappelle à nouveau ! La masturbation féminine est encore un sujet hyper tabou, l’orgasme féminin continue à être traité comme impénétrable et accessoire, les relations entre femmes sont considérées comme forcément inférieures car sans pénis mais tolérées car quand même ça excite les mecs, etc.

Même quand le plaisir des femmes est pris en compte voire recherché, il n’est pas rare de voir leurs corps préparés et mis en scène de manière à uniquement plaire au regard masculin : corps “efficaces” sans rien qui dépasse, épilés au plus près et parfois refaits, positions complètement incongrues voire inaptes au plaisir, etc. Tout ça, ça bloque complètement l’identification, ça fait culpabiliser plus que ça n’émoustille, et c’est même quelquefois franchement ridicule. Sans oublier que la majorité des femmes représentées sont blanches et cis, et que quand elles ne le sont pas elles sont alors érigées en curiosités exotiques qui font vendre.

En ce qui concerne les domaines de la BD, j’y connais peu le rayon érotique à vrai dire, mais je ne vois pas pourquoi ils échapperaient à la règle. Une exception qui vaut le coup d’oeil, c’est Comtesse d’Aude Picault, une belle histoire de fesse qui m’inspire beaucoup.

Comment se compose l’équipe ?

Pour l’instant nous sommes quinze, et je n’en connais pas beaucoup hors internet ! La majorité est française, malgré mes appels via Tumblr pour rassembler des gens des quatre coins du monde. En tout cas je compte sur le fait que notre groupe s’élargira de plus en plus !

Quel est l’ambition du projet sur le long terme ?

Pour l’instant, être nourri régulièrement de contributions diverses et variées, trouver un public et convaincre de nouveaux talents de se joindre à l’aventure. Je suis pas mal excitée par l’idée de gérer une plateforme où les femmes et minorités de genre peuvent s’exprimer et partager sans fard sur leur sexualité, leurs envies, leurs fantasmes. Idéalement j’aimerais que ce projet bénévole aboutisse sur quelque chose de rémunérateur, mais je ne peux pas vraiment en dire plus car je suis en pleine réflexion.

Lubna

Grande rêveuse devant l'éternel, Lubna aime les livres, les jeux de mots et les nichoirs en forme de ponts. Elle écrit sur l'art, avec un petit a : bd, illustration, photo, peinture sur soie. Twitter : @Lubna_Lubitsch