Bitch Planet, bd féministe certifiée non-conforme

Sortie le 4 mai dernier chez Glénat Comics, la bd Bitch Planet parle d’un gang de gonzesses ! En cage et en rage ! Lorsque le récit commence, des femmes sont sermonnées : « la Terre est notre père, et votre père vient de vous renier. Vos pêchés, votre gloutonnerie, votre fierté, votre faiblesse et votre immoralité atteignent un tel degré que toute tentative de correction serait vaine. Pour le bien de tous, pour éviter une contamination, une ablation est nécessaire… En ces lieux vous vivrez le reste de votre vie dans la pénitence et le labeur ».

Pas de bol, dans cette BD le monde est gouverné par le diktat des hommes et les femmes qui ne se plient pas à leur volonté – les « non-conformes » – sont envoyées dans une prison appelée Bitch Planet. La scénariste Kelly Sue DeConnick (Pretty Deadly, Captain Marvel) et l’illustrateur Valentine De Landro (X-Factor) nous invitent ici à découvrir des femmes qui résistent aux codes de bienséance qu’on leur impose.

Et ça fait son petit effet, croyez-moi. Pour tout dire, dès la lecture des premières pages, j’ai pensé simultanément à Orange is The New Black, au Moyen-Age, à Game of Thrones (cassdédi à la sœur qui ne cesse de répéter « Confess » à ses prisonnières), au Sourire de Mona Lisa et aux années 50 (« Fais des enfants, sois sage, gère ton foyer et épouse un beau parti !). Un drôle de mélange donc. Mais qui marche.

Sans spoiler (à vous de découvrir l’histoire par vous-même), Bitch Planet traite de l’anormalité dans toute l’ampleur de sa définition. Pas réduite à l’allure vestimentaire, non, ni au milieu social, ou au casier judiciaire ou à l’intellect, non ! Ici, les héroïnes sont des femmes comme vous et moi. Jugées trop sages, trop exubérantes, trop grosses, trop masculines, trop violentes, trop folles ou trop déviantes. Et le récit est prenant d’un bout à l’autre car chaque personnage a droit à ses flash-back et à l’explication approfondie du pourquoi de sa présence sur Bitch Planet (ça m’a rappelé OITNB). A noter que la trame principale n’est pas focalisée sur l’homosexualité.

Cerise sur le gâteau : le volume se termine avec un corpus de 20 pages contenant des interviews, des témoignages : « Le féminisme se doit d’œuvrer pour le bien de toutes les femmes », des débats : Le féminisme sert-il encore à quelque chose aujourd’hui ? », ainsi qu’une présentation de non-conformes historiques (Olympe de Gouges, Simone de Beauvoir, Ching Shih, Anna Nzinga…).

Je finirai simplement en vous conseillant de lire ce volume 1 de Bitch Planet (eh oui, il y a une suite !), et en citant Kelly Sue DeConnick :

« La non-conformité, ce n’est pas le fait de se qualifier, de dire : « Je suis trop punk-rock ! ». Vous pouvez très bien ressembler à quelqu’un issu d’un milieu privilégié, à un Américain blanc et riche : de l’extérieur, tout semble parfait, vous ne manquez de rien. Mais peut-être qu’intérieurement, vous luttez contre une dépression ? Peut-être êtes-vous gay ? A l’intérieur, une partie de vous n’est peut-être pas ce que le monde exige de vous… Si vous avez la chance d’avoir cette apparence de conformité, vous ayez un tribut moins élevé. Mais vous ne vous en sortez pas indemne non plus. ».

Honnêtement, la prochaine fois que vous passez dans une librairie, feuilletez Bitch Planet, juste pour voir.

Charlotte

Quand elle n'écrit pas sur ses coups de <3, Charlotte tente de progresser en skateboard et d'arrêter de se perdre dans Paris. Vainement.