Les burneshas albanaises : ces femmes qui peuvent choisir de vivre comme des hommes

On peut faire des découvertes vraiment intéressantes sur la Page Pute de Brain Magazine. Dans un billet sobrement intitulé « La maman de ma maman c’est mon pépé« , le site présente ainsi quelques photos de « burneshas », ces femmes qui dans certaines régions d’Albanie peuvent décider de vivre leur vie en tant qu’homme, en étant totalement acceptées par leur communauté. On a voulu approfondir la question.

La photographe Jill Peters s’est rendue dans ces régions reculées d’Albanie à la rencontre de ces femmes et a réalisé un travail assez bluffant disponible sur son site pour faire connaître cette tradition méconnue. Entre protection d’une société patriarcale et opportunité pour les femmes de sortir des restrictions de la condition féminine, une telle formalisation et acceptation d’une transition du statut social de femme à celui d’homme est un cas unique en son « genre ».

Cette tradition s’inscrit dans une société où les femmes jouissent de très peu de considération. Selon le 29ème article du Kanun, un ensemble de codes et de lois utilisé dans certaines régions d’Albanie et au Kosovo du 15ème au 20ème siècle, il est en effet spécifié que « les femmes sont des sacs, faites pour endurer ». Ambiance.

Lorsqu’il n’y a plus d’homme dans le foyer (par exemple à cause de la guerre, ou si les parents n’ont eu que des filles), c’est donc une vraie honte pour la famille, qui peut tout perdre. Plutôt que de donner davantage de droits à une femme, celle-ci peut choisir de se transformer en homme pour rétablir la situation. Tout simplement.

Devenir une burnesha permet d’assimiler les droits et devoirs normalement réservés au sexe masculin : travailler, hériter, participer au conseil du village, porter une arme pour défendre sa famille etc. Mais elle doit également prêter un serment irrévocable de célibat. Les burneshas jouissent d’un grand respect au sein de leur communauté, et parmi les femmes rencontrées par Jill Peters, aucune ne regrettait cette décision.

Au-delà du sacrifice familial, les femmes peuvent faire ce choix pour des raisons plus personnelles. Certaines femmes ont  déclaré effectuer cette transition car elles se sentaient davantage homme que femme, d’autres pour échapper au mariage forcé.

Sans bousculer l’organisation patriarcale, devenir socialement un homme peut être un moyen pour les femmes de devenir un sujet à part entière de la société. A quelques détails près tout de même, puisqu’on le rappelle, ces femmes ont l’obligation de rester chaste, au risque d’être rejetées par leur communauté.

La modernité arrivant peu à peu dans les régions reculées d’Albanie, les femmes jouissent de davantage de droits, et cette étonnante pratique est en train de s’éteindre. La plus jeune des burneshas rencontrée par Jill Peters était âgée de 42 ans.

Pour témoigner de cette tradition, la photographe est également en train de produire le documentaire He/She/He, dont le trailer a été révélé récemment ici

Jude

Crédit Photos : Jill Peters

http://www.jillpetersphotography.com