La petite mort dans un lieu improbable

On parle souvent des lieux où l’on baise, d’endroits insolites pour faire l’amour, d’anecdotes à deux ou à plus.  Dans un train, une cabine d’essayage ou dans la salle de bain d’une amie lors d’une soirée. Les articles sur le sujet pullulent sur le net. Mais jusqu’ici, on a peu lu sur la masturbation dans des lieux improbables.

Alors que l’on trouve des « Top 10 des meilleurs endroits pour faire l’amour » et des « Top 10 des meilleures positions » par dizaines, le plaisir solitaire se fait lui plus discret. Sans doute parce que ces lieux servis à l’amour à deux peuvent également servir à la pratique masturbatoire. Certes. Mais concrètement, où est-ce que vous vous masturbez lorsque ce n’est ni dans votre baignoire, ni sur votre lit ou sur votre canapé ?

Dans quels lieux vous êtes vous sentie soudainement excitée, tellement excitée que vous n’avez pas pu attendre un endroit calme ? Tellement excitée que d’ailleurs vous n’avez pas eu envie d’attendre un endroit clos. Tellement excitée justement par la proximité avec le monde autour, la vie urbaine frénétique autour de vous ?

J’ai demandé à plusieurs femmes de me raconter leurs anecdotes masturbatoires.  Celles qui ont lieu dans des endroits parfois surprenants pour certaines et plus banals pour d’autres. Des lieux dans lesquels on ne s’attend pas à être excitée, à se masturber, qui nous étonne même au moment de passer à l’acte. Des lieux dans lesquels seule la fois compte, et qu’on se plaît parfois à raconter avec sourire.

Laura s’est par exemple plue à raconter cette anecdote ; anecdote sur le palier de son ancien appartement qu’elle associe à une période particulièrement mouvante de sa vie :

« La dernière fois que je me suis masturbée dans un endroit improbable, c’était il n’y a pas si longtemps alors que j’attendais mon ancienne proprio sur le palier de mon ancien appart. Il faisait assez chaud dedans comparé aux températures extérieures. Je lisais un livre, assise par terre quand j’ai été prise d’une envie de me masturber. J’ai commencé à mettre la main gauche et froide dans ma culotte mais ce n’était pas suffisant et pas pratique avec les collants et les couches de fringues. J’ai baissé ma culotte, ai inséré un doigt de ma main droite tandis que ma main gauche faisait le reste. J’entendais la porte de l’immeuble s’ouvrir et se fermer et l’ascenseur descendre et monter. Je n’étais pas forcément excitée à l’idée d’être surprise par quelqu’un-e cette fois ci, mais plutôt par le fait que je me masturbais sur le palier de mon ancien appart, comme si y’avait quelque chose d’émotionnel qui entrait en jeu également. Je ne sais pas trop. Je n’ai pas eu d’orgasmes parce que je commençais à avoir des crampes à l’avant bras mais c’était bon ».

Marie, quant à elle, semblait particulièrement frustrée et excitée la dernière fois qu’elle s’est masturbée dans un lieu public :

« La semaine dernière, je me suis masturbée à mon cours de théâtre. J’assistais à la répétition de mes camarades et je ne jouais pas. J’étais très frustrée de ne pas être sur la scène. En plus j’étais frustrée globalement du travail que nous effectuions. Et surtout, j’avais très envie de baiser car ma libido est à son paroxysme en ce moment depuis ma séparation, c’est comme si je retrouvais une nouvelle liberté. Du coup, je suis allée aux toilettes pour me masturber en pensant à personne mais juste à une scène très exhibitionniste ou je baisais sur scène. Ça m’a tellement excité que j’ai eu deux orgasmes qui se sont déclenchés très vite. »

Julie, elle, a l’habitude de se masturber dans des lieux extérieurs car sa pratique est assez discrète :

« Etant donné que j’arrive à me masturber en croisant les jambes et en contractant mes cuisses, et que c’est quasiment imperceptible, j’ai pu me masturber un peu partout, quand je le voulais, même si il y avait des gens autour de moi. Je le fais très souvent en cours notamment, mais ça m’est arrivé aussi dans le métro, au restaurant, au cinéma, dans le train… Enfin bon c’est assez pratique. »

Enfin, pour Johanna, se masturber est une activité qui l’aide aussi à s’endormir, donc elle s’est masturbée à peu près partout même lorsqu’elle était entourée :

« Le mieux,  c ‘était à l’agence où je travaillais. Mon bureau était vraiment en face de l’entrée je voyais la rue, la gare de Colombes, les boutiques. On pouvait me voir et je me cachais juste avec mon manteau… Je pouvais faire ça plusieurs fois par jour. Jamais aucun client ne m’a surprise car je voyais si quelqu’un arrivait mais souvent j’ai eu des clients après.. Je trouvais cela très sexuel car j’étais encore humide pendant que je leur parlais. Et bizarrement les clients étaient toujours plus aimable comme si une vapeur sexuelle se trouvait dans l’agence et les rendait plus sympas. Je sais, cela peu paraître bête… Une fois un client m’a interrompu mais j’étais tellement excitée que mon orgasme s’est terminé au moment où il est entré et il m’a demandé « Vous avez froid ? » car j’avais mon manteau sur moi. J’ai répondu « Oui je suis enrhumée ». C’était en plein été… »

On dit souvent aux femmes que la masturbation est une activité intime et personnelle, et elle l’est. Mais ce qui peut la rendre encore plus intime et excitante est l’idée d’être entourée de monde, de voir des gens sans être vue. Selon moi, se masturber en public, s’exhiber sans vraiment se montrer est un aspect important de notre sexualité.  Il révèle l’estime que nous avons pour nous mêmes. Il me semble que se faire masturber, et en public, est révélateur d’un véritable bien-être sexuel. Risquer de se faire voir, c’est ne plus avoir peur du regard que l’on nous porte. C’est retourner ce regard à son avantage et en tirer du plaisir.

 

Sarah

Sarah

Sarah ne parle plus trop de cul ni d'amour d'ailleurs mais ses passions demeurent : féminisme, antispécisme, santé mentale et gingembre.