Le suivi gynécologique, qui, quand, comment ?

« Pioufff, je dois aller chez le gynéco dans 15643 mois (pas de rdv avant), tu vas chez qui toi ? » Blanc. « Un gynéco ? Mais pour quoi faire ? ». Tu as beau essayer de faire plein de bébés avec ta copine, tu as bien vu que ça ne marchait pas, que tu n’avais pas besoin de contraception. Du coup, le gynécologue, tu préfères t’en passer.

Ma bonne dame, TU AS (presque) RAISON !

Si les femmes de votre famille n’ont pas toutes eu des cancers gynécologiques (sein, utérus, ovaire) jeunes (comprendre avant 60 ans), si vous n’avez aucun problème particulier, 
nul ne sert d’aller consulter de manière trop régulière. C’est désagréable pour rien, c’est médicalement inutile et on finira par ne plus y aller par ras-le-bol. Il faut consulter quand il le faut.

Pourquoi et quand consulter ?

Quand il le faut ? C’est-à-dire ? Le premier frottis se réalise à 25 ans puis un an après et enfin tous les 3 ans. Un des principaux risques gynécologiques dans la vie d’une femme est le cancer du col de l’utérus. Il est essentiellement lié à la présence d’un certain type de virus HPV (papillomavirus). Quasiment toute femme ayant eu une activité sexuelle un jour a été mise en contact avec les HPV. Ils ne provoquent pas tous des maladies et, autre bonne nouvelle, le cancer du col de l’utérus se développe très lentement. 
Les recommandations actuelles sont de réaliser des frottis régulièrement pour savoir si des cellules anormales sont présentes au niveau du col. Tout professionnel de santé qui vous dira le contraire en l’absence de facteurs de risques particuliers, travaille en dehors des recommandations.

Je vous parlerai très peu du cancer du sein. Hors cas particulier, il se développe essentiellement chez des femmes de plus de 60 ans. Un dépistage systématique (qui sera surement réévalué) est déjà mis en place. A la limite, une auto-palpation des seins régulière peut se discuter.

Qui consulter ? Et la lesbophobie ?

Il parait essentiel de se sentir à l’aise avec le praticien que l’on a en face de soi. Parler de sa sexualité, même si cela peut être parfois gênant, ne doit pas être un problème. Le professionnel de santé ne doit jamais rajouter du sel à votre malaise sinon… changez-en ! De même, nul besoin de mettre sa patiente complètement nue pour réaliser un examen gynécologique. Si vous vous demandez pourquoi on vous a fait enlever le haut et le bas alors qu’on trifouille votre entrejambe, vous avez raison.

Qui peut réaliser votre suivi ?

Un(e) sage-femme, un(e) médecin généraliste ou un(e) gynécologue. Tous les trois sont compétents dans le suivi gynécologique de prévention (questions diverses, frottis…) et la prescription de contraception (qui ne sert pas forcément que de contraception).

Où les trouver ? Les pages-jaunes, le site Ameli.fr ou son entourage.

La sage-femme aura l’avantage d’être disponible (un rdv à trois mois chez elle, ça n’existe pas) et pourra également vous suivre tout au long de votre vie gynécologique et obstétricale (du simple frottis au suivi de grossesse, jusqu’à la rééducation périnéale). Cependant, le nombre de sages-femmes exerçant en libéral et pratiquant le suivi gynécologique reste encore limité dans certaines régions.

Le médecin généraliste lui aussi est disponible. Si c’est votre médecin traitant, il connait en plus vos antécédents médicaux de manière fine. Omnipraticiens, ils ne peuvent être bons dans tous les domaines et certains ne pratiquent pas le suivi gynécologique. Mon conseil pour en trouver un bien lorsqu’on ne connait personne ? Aller voir la liste des lecteurs émérites de la revue Prescrire et demander lors de la prise de rendez-vous s’il fait des consultations gynécologiques. Vous aurez au moins l’assurance d’avoir un médecin soucieux de se former de manière régulière et indépendante. Par extension on peut imaginer que c’est un brave gars/fille.

Le gynécologue a pour avantage d’être spécialiste de la pathologie donc s’il survient un problème qu’une sage-femme ou généraliste ne peut gérer, vous n’aurez pas à consulter quelqu’un d’autre. L’inconvénient ? La priorité est à la pathologie et leur planning est souvent bondé avec toutes les conséquences que cela peut impliquer.

Enfin, un professionnel de santé se doit de rester toujours neutre, peu importe ce qu’il pense de votre mode de vie. S’il a des paroles ou des gestes déplacés, vous pouvez alerter le Conseil départemental de l’Ordre de sa profession.

Flo, sage-femme

 

Communiqué : Après certaines remarques interrogatrices de lectrices, voici quelques précisions:

– Oui cet article est sérieux
– Oui il faut être à jour de son suivi gynécologique, c’est à dire un frottis tous les 3 ans à partir de 25 ans après deux frottis normaux à un an d’intervalle (cf recommandations officielles)
– Dans le dépistage du cancer du sein par mammographie chez les femmes sans risque particulier, la balance bénéfice/risque est défavorable avant 50 ans, c’est à dire qu’il y a plus de risque à réaliser l’examen (risque d’irradiation, de sur-diagnostic…) et incertaine après 50 ans. (Revue Prescrire, Octobre 2007, N° 288 page 761). C’est pourquoi  » il faut consulter quand il le faut. »

Toute prise en charge médicale doit être basée sur des preuves, les arguments émotionnels se nourrissant de la peur ne permettent pas de faire de la bonne médecine tant à l’échelle individuelle qu’en terme de santé publique.
 
Que cet article interpelle est une bonne chose et tend à prouver le niveau de désinformation de la population générale. En tout cas il est bibliographié et basé sur des données scientifiques prouvées. Il découle des recommandations officielles en matière de santé publique. »